Avant de faire le ménage chez les autres…

…c’est bien de passer un bon coup de karcher balai devant sa porte.

Il y a deux ans, la plupart des Français regardait avec mépris, incompréhension et fascination les élections présidentielles américaines. Les primaires démocrates passées, il n’était pas concevable que Georges W Bush soit réélu. Bush était un con. Son bilan républicain était désastreux. Enlisement de la guerre en Irak, sécurité sociale archaïque, déficit budgétaire abyssal, programme de réductions d’impôts faites par l’administration Bush uniquement aux foyers gagnant plus de 200 000 dollars par an d’un montant de 1 300 milliards de dollars sur dix ans, suppressions d’emplois, hausse des prix de l’essence, des frais de scolarité et des dépenses de santé. Tout laissait penser que l’équipe républicaine allait être laminée. Kerry avait largement remporté les confrontations télévisuelles. S’il était élu, il offrirait de nouveaux choix sur les questions de l’emploi, de la santé, de la fiscalité et de la politique énergétique. Il reviendrait sur les réductions d’impôts faites par l’administration Bush aux foyers gagnant plus de 200 000 dollars par an. Ces recettes supplémentaires permettraient de financer une politique de crédits d’impôt destinée à favoriser la création d’emplois manufacturiers aux Etats-Unis.


Time, 19 Mai 2003
Il s’était également engagé à porter le salaire horaire minimum de 5,15 à 7 dollars d’ici 2007 et à offrir une couverture santé à un grand nombre des 44 millions d’Américains qui n’ont pas d’assurance maladie. Un nouveau « New deal ».

Le 2 novembre 2004, nous étions à Montréal. Nous avions prévu de passer toute la soirée sur NBC. Il fallait attendre la fin des votes sur la côte ouest. Nous étions certains de voir une carte des Etats-Unis remplie de bleu. Près de 120 millions d’électeurs s’étaient déplacés pour voter. Un véritable record. George Bush fut crédité de 58 873 744 voix, John Kerry n’avait recueilli que 55 307 830 voix. La carte fut couverte de rouge. Le parti de l’éléphant avait gagné.

Les Américains étaient vraiment des blaireaux. Ils avaient de la merde dans les yeux.

Nous avions alors la confirmation qu’une élection ne se gagnait plus de nos jours lorsque les débats étaient axés sur l’économie. Ce fut le cas en France en 2002. Même si le bilan du candidat n’est pas bon, c’est en misant sur la peur du peuple que l’on remporte les suffrages. Peur du terrorisme, peur des agressions, peur de l’immigration, peur des vols, peur des viols.

Le bilan économique de notre actuel ministre de l’intérieur et probable représentant de l’UMP fut peu glorieux lors de son passage au ministère du budget sous Balladur. La dette de l’Etat a littéralement explosé entre 1993 et 1995, passant d’environ 45% du PIB à 55% du PIB en deux ans (1). Le bilan actuel du ministre de l’intérieur n’est pas meilleur. Entre mai 2005 et avril 2006, les violences contre les personnes ont augmenté de 8 % par rapport aux douze mois précédents (2). Mais il communique. Et il est vraiment très fort.

Tout comme les Américains, les Français n’ont aucune culture économique. Ils sont véritablement incultes. Une récente enquête indique que peu de personnes connaissent les critères de Maastricht, le poids de la dette française, les budgets des ministères ou le simple coût des politiques sociales.

Tout comme les Américains, les Français achètent hélas peu de journaux et s’informent principalement par la télévision. Aucun effort. La plupart souhaite obtenir une information lisse, rapide, prémâchée et sans analyse pertinente. Aux Etats-Unis, il y a la Fox de Ruppert Murdoch, en France il y a TF1 (propriété de Bouygues, ami proche de Nicolas Sarkozy). Le groupe France Télévision est de son côté dirigé par le biographe de Bernadette Chirac (3). Chose impensable dans les pays anglo-Saxons, la presse est détenue par de grands groupes industriels. Le Figaro est la propriété de Dassault, Hachette (groupe Lagardère) est actionnaire du Monde et de nombreux quotidiens de la presse régionale.

Ouhaaa, comme je me la joue à la Se non è vero et ses couv’ amusantes…

J’ai discuté des futures élections avec de nombreuses personnes. Je ne suis pas affilié à un parti, ni à un candidat. J’aime débattre. Mes propos ont certainement laissé pensé que j’allais voter socialiste. J’aime bien contredire mes interlocuteurs. On m’a dit que j’étais égoïste de vouloir voter à gauche. On m’a affirmé que la France méritait mieux. Curieusement, la plupart de ces personnes profitaient et appréciaient les multiples avantages sociaux instaurés par les divers gouvernements de gauche. Mais parler de ça n’avait bien entendu rien à voir avec les élections.

Oui, je suis égoïste de penser voter à gauche. Egoïste et intéressé. C’est bien connu, les célibataires, jeunes cadres, diplômés, ne recevant aucune aide sociale et payant beaucoup d’impôts et de taxes diverses représentent l’électorat type de la gauche.

Les prochains mois risquent d’être passionnants. La peur est porteuse. C’est la clef des prochaines présidentielles.

(1) Sources mediasetdemocratie.net et INSEE
(2) Sources « Le Monde » et Observatoire national de la délinquance (OND)
(3) Conversation, 2001

24 commentaires sur “Avant de faire le ménage chez les autres…

  1. Passionnants mais cruels aussi… La droite parait mieux organisee pour aller au combat avec un « chef » tres motive, la gauche se perd en querelles. Qui sera le candidat du PS ? Sur quel programme ? Et sur quel discours ?

    Le PS ne parait pas assez revolutionnaire aux yeux de certains qui refusent de voter utile .
    Des electeurs silencieux mettront dans l’urne le bulletin du FN : dans quelle proportion ?

  2. Ah je voudrais apporter une petite touche d’espoir et d’optimisme, helas, les faits sont la. Ce n’est pas les gesticulations du PS a La Rochelle qui vont arranger les choses. Quelle energie a se dechirer !
    Quelqu’un recemment m’a dit qu’il n’irait pas voter quitte a ce que la droite soit elue, tant pis disait-il, au moins mon ennemi sera vraiment la droite !
    Les mois a venir risquent d’etre rudes.

  3. Bonne analyse. Moi qui ne regarde pas la tele, ecoute la radio, lis un quotidien, ainsi que quelques blogs, je me sens finalement un peu seul… C’est deprimant. Surtout quand je me rends compte que si je veux prevoir un tantinet les votes de 2007, je vais devoir regarder TF1… :furious_tb:

    A part ca, juste une precision concernant votre billet : sur les cartes electorables etats-uniennes, j’ai le souvenir que les republicains etaient en rouge et les democrates en bleu, et non pas l’inverse.
    Voila, c’est dit. A+ :happy_tb:

  4. Je suis scotche par la qualite de ton article.
    Merci.
    Et ouais, on est mal barres. A force de parler de politique a droite a gauche, je commence meme a m’interroger sur le bien fonde du droit de vote universel…

  5. Tres bon article. Oui on est mal parti car Les francais en majorite ne sont pas de gauche. Oui la gauche a perdu son electorat populaire en ne repondant pas a ses interrogations. Les differents candidats socialistes n’ont pas de programme. Les reveils risquent d’etre difficiles.
    Je me demande si « egoistement » j’irais voter en 2007.

  6. Teneur generale du post de facture excellente, o??⬨? l’on rappelle salutairement que les Francais, ces donneurs de lecon, ont propulse en finale de leur presidentielle Jean-Marie, cet humaniste des temps modernes et alter notoire, en face d’un ringard opportuniste et corrompu jusqu’a la moelle. :clap_tb:

    Ce que l’histoire ne dit pas, c’est combien de jeunes cadres diplomes, proprietaires d’un appart a Paris a 30 ans, qui payent des impots et autres taxes, ne recevant aucune aide sociale votent a gauche pour se donner bonne conscience? (et qui en plus viennent faire la morale aux autres mechants qui n’ont pas la bonne idee de voter socialiste comme eux, que ce soit + a gauche ou + a droite) Sacres bobos… :happy_tb:

    Et sinon, je ne suis pas d’accord pour accabler Nicolas en tant que responsable unique et inique du creusement de notre dette nationale entre 93 et 95. Eh! Et la recession? :huh_tb:

  7. Mmmh comme j’ai un ego demesure et que j’ai une formation economique de 1ere classe, je tiens a venir deboulonner qques contre-verites economiques sur la recession de 1993, ce qui n’interessera vraisemblablement personne (a part toi et moi, sans doute):
    – Le prix du baril n’est certainement pas la variable qui fait trembler les economies, sinon tu t’imagines bien qu’on en serait presque tous a gratter la terre pour bouffer a l’heure qu’il est…(croissance de 2.5%, pas mal non?…)
    – le dollar faible, peut-etre…Mais en meme temps, 1993, c’est l’??⬨

  8. Un post que je pourrais faire mien bien que je n’aie pas comme la majorite des francais semble t’il de culture economique. Cela rechauffe de voir qu’il reste quelques irreductibles qui ne voteront pas pour le nain en 2007 ;-))

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