Deux Verdi sinon rien : Un Bal Masqué un peu raté et une Traviata pas si raplapla.

Lorsqu’on est malheureusement une personne désorganisée et un peu tête en l’air, il faut éviter à tout prix de prendre des tickets pour un opéra quelques jours après son déménagement. J’étais persuadé que nous avions pris des places pour assister à une représentation du « Bal Masqué » de Verdi pour juillet. J’avais pourtant lu les billets et les mails de mes copines Fauvette et Gilda qui avaient eu la malchance d’assister à une représentation un peu pourrie quelques jours plus tôt. La médiocrité de l’opéra nous a été confirmée par un Palpatine enchanté de sa visite des coulisses de Bastille et rencontré pendant l’entracte. Mais je ne me souvenais pas de la date que nous avions choisie, ni de l’endroit où j’avais soigneusement rangé ces fichus billets. J’ai donc passé toute une soirée à vider des cartons et à trier de la paperasse pour trouver in extremis nos billets, billets valables pour la représentation du lendemain. Gné.

« Un bal masqué » n’est certainement pas le meilleur Verdi. Mais Verdi, c’est Verdi, et on se laisse facilement tenter par un shoot de bon gros lyrisme des familles. Mais il ne faut cependant pas pousser mamie dans les orties. Le livret de cet opéra est particulièrement vide et insipide. On se demande même pourquoi et comment ce bon vieux Giuseppe s’est lancé dans cette aventure un peu foireuse. On va encore nous parler une fois de plus de l’unification nationale italienne et de l’engagement politique de Verdi. Cependant, l’évènement politique à l’origine d’un bal masqué serait l’assassinat du roi de Suède Gustave III d’un coup de pistolet dans la salle de l’opéra royal de Stockholm. Mais l’époque était à la censure et le livret fur remanié de nombreuses fois. Et pour ne contrarier personne, l’intrique a été déplacée aux Etats-Unis. Le gouverneur Riccardo Warwick est amoureux d’Amélia, la femme de son meilleur ami Renato. Renato (pas celui de la cage aux folles) surprend Amélia et Warwick. Il pense immédiatement qu’il y a hippopotame sous caillou et décide de se venger en zigouillant le gouverneur lors d’un bal masqué alors qu’il n’y a même pas eu la moindre soupe de langues. Rénato est donc un sacré couillon au sang chaud. Olé.

Côté interprétation, rien à redire. Riccardo (Marcelo Alvarez) et Amélia (Angela Brown) forment un très joli couple, même si le voluptueux physique de la soprano ne colle pas forcément au personnage. Le plus choquant fut certainement la mise en scène insipide de Gilbert Delfo et les décors froids et aseptisés de William Orlandi. L’opéra est en noir et blanc, sombre et glacé. Les décors laissent un moment deviner que l’action se déroule aux Etats-Unis. Une scène nous propose d’affreux serpent à l’allure viking. Enfin le bal masqué final nous ramène dans l’Italie de la « comedia del arte ». Si nous avons passé un bon moment, cette présentation ne restera certainement pas dans les annales.

Je n’avais pas seulement retrouvé les billets pour « Un bal masqué ». J’avais également retrouvé le billet pour la Traviata que Frédéric m’avait proposé. Le pauvre chou avait préféré partir en vacances en Corse plus tôt que prévu et donc zapper une soirée à l’opéra. Je me suis donc sacrifié. Nanette m’avait pourtant prévenu. Attention, ça risque d’être bien pourri. Mais la Traviata est pour moi un des plus beaux opéras de Verdi, donc un des plus beaux opéras tout court, avec peut-être Macbeth. Tout le monde connaît les aventures de Violeta au pays de la tuberculose. Tout est connu. La Traviata transpire le tube de l’été. Tous les airs ont été repris, même par des publicités vantant les mérites des serviettes hygiéniques. La Traviata, c’est également un rôle très physique, rôle confié à Christine Schäfer. Alfredo était joué par l’excellent Jonas Kaufmann et son père par l’inusable et sans surprise José Van Dam.

Je suis arrivé en retard et la tête dans le cul à Garnier à Garnier. Je n’avais pas mis mes lentilles ni mes lunettes. Un individu m’a fait signe. C’était Frédéric. J’ai eu un moment de flottement. Pourquoi m’avait-il refilé sa place alors qu’il était face à moi ? Mes neurones se sont finalement connectés et j’ai vite compris que je n’étais pas face à Frédéric mais face à son vrai jumeau Rémi. Je suis vraiment parfois un peu conne.

La mise en scène était très particulière. L’action se déroulait vraisemblablement dans les années 50. Les décors étaient pauvres et semblaient représenter les vestiaires d’un music-hall. La décoratrice, Anna Viebrock aurait puisé sa source d’inspiration principale dans la salle de spectacle de l’ancien Kulturaus de Chemnitz, dans l’ex-Allemagne de l’est. Les décors ne transpiraient donc pas la gaité et la joie de vivre et contrastaient fortement avec les dorures du palais Garnier. La ressemblance entre Edith Piaf et Violetta était troublante. L’agonie de Violetta faisait penser à la dernière représentation de Piaf à l’Olympia. Christine Schäfer est une petite femme aux cheveux roux. Je n’ai pas pu m’empêcher de voir Piaf en fin de vie ressemblant à un orang-outang chétif dans « La Môme ». Marceeeeeeeelll !

Christine Schäfer s’est copieusement fait huer à la fin du premier acte. L’exercice est à la fois physique et dangereux. Même si on sentait une certaine saturation dans la voix de la soprano dans le dernier air (Follie ! Delirio vano è questo !), les sifflements étaient déplacés. Mais la Schäfer a eu des couilles de taureau et ne s’est pas dégonflée. Elle a véritablement charmé l’auditoire, notamment dans le fameux et fabuleux duo avec le père Germont (dite alla giovine). Résultat : des applaudissements nourris en fin de spectacle. Ce ne fut malheureusement pas le cas de l’orchestre.

Désolé, le billet est un peu long. Mais je ne parle pas de Russie (humour gras de répétition).

Ah, et pi juste une dernière chose :

Et Freddy, ce n’est que du pipi de chaton par rapport à ma situation professionnelle.

J’ai l’impression d’avoir la colonne vertébrale truffée de couteaux, et ça fait un peu mal. :huh_tb:

Cela m’a fait du bien d’en parler.

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