Ode à mon Phobos

Lorsqu’on s’engage à s’occuper d’un animal, on ne se rend pas compte que l’univers paisible et agréable dans lequel on a pris l’habitude de vivre risque d’être dramatiquement modifié . Et c’est tant mieux car on ne s’engagerait jamais dans une telle aventure. Il est ainsi bien tentant de se laisser tenter par un petit chat ou un petit chien. Rien à voir avec une tortue ou un poisson rouge qui prennent le plus souvent le chemin du porcelaine express (les chiotes) quelques mois après leur arrivée au sein du foyer. On en prend au minimum pour dix ans à moins de craquer et de refiler la bestiole à ses parents qui n’attendent finalement que ça car ils habitent dans une grande maison bien triste depuis votre départ.

Ma vie a changé le jour ou Phobos a posé ses petites pâtes à la maison. Si Phobos est le nom du plus grand des deux satellites de Mars, c’est avant tout le nom du chat que j’ai adopté il y a plus de seize ans. La mère de mon meilleur ami de l’époque avait trouvé cette petite boule de poil abandonnée sur le bord d’une route. Je n’ai pas pu résister a ses yeux dorés et à son pelage bleuté. Je l’ai ramené à la maison. Il avait à peine deux mois. Le challenge était important car ma grand-mère n’arrêtait pas de me rappeler que c’était le chat ou elle. Elle n’était pas allergique au poil de chat mais avait été traumatisée par un chat qui lui avait sauté à la figure pendant la guerre (sic).

Prendre en charge un chaton non sevré à ses avantages et ses inconvénients. Même si l’inné joue un rôle considérable dans la vie de l’animal (faire sa toilette, se lécher correctement la rondelle, ronronner), l’acquis joue un rôle tout aussi important. En résumé, personne ne lui a appris qu’il était un chat. Il ne sait pas bien miauler, ne sait pas manger ni mâcher correctement les aliments et est d’une extrême dépendance vis-à-vis de ses maîtres. Il hiérarchise également son entourage. Je suis son maître et il me respecte. Il considère ma mère comme du petit personnel car elle a en charge le remplissage de sa gamelle et le nettoyage de sa caisse à merde.

La première année de vie en commun fut réellement difficile. Le chat commence à délimiter son territoire en pissant aux quatre coins de l’appartement. Les répulsifs ne sont d’aucune utilité. Il flingue toute les plantes, fait ses griffes sur le papier peint, sur les fauteuils en cuir ou sur les meubles, et détruit les rideaux. La décoration de l’appartement change. On s’adapte au chat. Il ne vit plus chez nous mais nous vivons chez lui. Le chat s’habitue également aux horaires de réveil mais ne fait aucune distinction entre le mardi et le dimanche. Il est habitué à manger à 7h00 le matin en semaine. Il fera donc part de son mécontentement s’il n’est pas nourri à la même heure le week-end. Phobos ne savait pas miauler. Qu’importe. Ainsi avait-il compris qu’en grimpant sur le buffet et en frottant ses griffes sur une assiette accrochée au mur, il pouvait produire un bruit assez énervant pour réveiller toute la maison et avoir sa précieuse pâtée.

Phobos m’a pourtant vite apprivoisé. Toujours tenté de grimper sur mon bureau et jouer avec mes crayons, de poser ses coussinets humides sur mes feuilles de papier et étaler ainsi l’encre fraîche. Toujours envie de ronronner au beau milieu de la nuit, de poser délicatement une patte sur mon visage. Toujours amusé de jouer avec mes pieds ou avec mes mains. Toujours envie de se retrouver à côté de moi. Toujours dans mes jambes. Toujours me signifier affection et respect. Toujours montrer son indépendance. Toujours se mettre sur les genoux des visiteurs apeurés par les chats. Toujours avoir envie de charmer.

Seize années plus tard, Phobos est passé par les mains expertes de ma mère, inventrice du thruithon. Je suis intimement persuadé que le chat lui a permis de compenser mon départ, il y a près de dix ans. Je pourrais même parler de transfert affectif. Ma mère lui prépare des repas trois étoiles. Il est ainsi passé de cinq à onze kilos en quelques années pour ressembler au chat du Cheshire.

Phobos a cependant toujours le même regard profond. Il est maintenant vieux. Il ne va pas tarder à mourir. Je m’habitue déjà à son absence et cela m’attriste. Mélange d’anthropomorphisme et de gâtisme. Qu’importe. Il représente une partie de ma vie et je l’aime. Samantdi a publié il a quelques temps une ode à sa Nini. Ce billet est donc en quelque sorte l’ode à mon Phobos.

Alors à tous les amoureux des chats, tous à ceux qui les détestent, à ceux qui se font pourrir leurs parties de jambes en l’air, à ceux qui refilent leur chatte à leur mère, à tous les possesseurs de chats volants, je dédie ce petit film.


Rien à rajouter. :king_tb:

35 commentaires sur “Ode à mon Phobos

  1. Très très beau texte. J’en ai un peu la larme à l’oeil tiens. Si si ! Par contre, si un chat venait à faire ça (avec la batte de base-ball), même si je l’aime, même s’il est adorable autrement, je ne sais pas si je pourrais garder mon calme :furious_tb: .
    Enfin bon, je dis ça, je dis ça mais je n’ai jamais pu m’énerver envers un petit compagnon à quatres pattes… :blush_tb:

  2. Je te rejoins sur tout (sauf que une patte de chat, ça s’écrit quand même avec deux T et pas d’accent circonflexe, mais bon, c’est l’émotion) Ma différence tient au fait que je n’ai personne à qui refiler la mienne en cas de crise… alors j’assume jusqu’au bout, déjà 7 ans qui sont passés comme l’éclair.

  3. Môman m’a appelé hier (elle a même laissé des messages à des collègues) pour m’apprendre que Voyelle passait par la chatière depuis hier midi. Grande émotion à la maison.
    :clap_tb:

  4. Mais Phobos ne t’aura pas doné l’occasion d’avoir un chat diabétique à la maison… Avec Téquila, c’est un vrai bonheur car en plus du réveil à 7H30 même le week-end, il faut se lever, lui faire son injection d’insuline, attendre une demi heure dans les miaulements les plus insupportables puis lui donner 25 grammes de croquettes dégueu pour diabétique aux légumes sans viande… Et le soir on remet ça à 19H30…

  5. Sourires. Ca me rappelle quelques souvenirs. Des tristes et des joyeux.

    Cro-Mi est dingue des chats, je maudis les allergies de L’Amoureux, j’aurais bien craqué, moi aussi…

    Profite bien de vos derniers temps, va.

  6. Moué, une bonne saloperie de chat comme on les aime. Je pense que l’amateur de chat est masochiste, et a besoin de se sentir dominé par cet être inférieur.

    Quand je repense aux miens, ce matin, agglutinés à leur gamelle telles deux tiques dans le repas de sang… :annoyed_tb:

  7. J’ai toujours vécu entouré de chats et il y a fallu que je me trouve un mari allergique à leur poil :blink_tb:

    J’adore la vidéo, c’est très drôle et si vrai :wub_tb:

  8. oui, c’est terriblement bien décrit. Je peux considérer que j’ai de la chance car Chat2 le siamois qui dort avec moi, s’adapte à mon heure de réveil, quelle qu’elle soit, à condition de supporter son poids sur mon visage et d’arriver à trouver une faille pour continuer de respirer à travers ses poils, car c’est là qu’il termine sa nuit et attend patiemment l’heure du petit déjeuner…

  9. Tu as de la chance d’avoir un chat qui vit aussi longtemps (et si l’on en croit Valérie, il va peut-être vivre encore autant)… chez nous, ils se font écraser et nous ne les gardons que quelques années, au mieux. C’est chouette de grandir avec un animal, d’évoluer avec lui qui nous regarde en coin l’air de dire « je te connais, va ! »

  10. @ TarValanion: ah ah, d’habitude c’est moi qui suis incapable de voir la video! :laugh_tb:

    @ JM: Je crois que malheureusement les chats ont d’autres armes que la batte: leurs griffes. :furious_tb:

    @ l’Elephant: T’ain, la honte. Ouhaaaa, j’ai honte. Texte commencé certainement trop tard hier soir et terminé trop tôt ce matin. :blush_tb: (j’ai corrigé en douce)

    @ Matoo: kenenaafout’, t’as récupéré le powerplate. Matoo, twelve points. :king_tb:

    @ Philoo: Mais oui, j’ai oublié d’avoir une pensé pour ton chat diabétique. Pauvre Téquila. :huh_tb:

    @ Anne: Et un chat sans poil? :thumbup_tb:

    @ Mich » aka Albator: Tu as certainement raison pour le côté masochiste. :bye_tb:

    @ Miz: Prend un chien… :jittery_tb:

    @ MarcelD: Faut faire comme ma mère. Elle change la caisse à merde toutes des 12 heures. Maniaque? :blink_tb:

    @ Fab: Ouais, l’allergie a bon dos… :happy_tb:

    @ Madeleine: Comme tu le sais, on a eu un peu peur.
    Entre arthrose et problèmes rénaux, nous avions déjà mis une option sur le cercueil. :annoyed_tb:

    @ Valérie de haute Savoie: Ouhlala, encore 7 ans. Il a déjà beaucoup de mal à bouger, je l’imagine difficilement dans quelques années. :dunce_tb:

    @ Saperli: mais dis moi, tu as un chat en or! :thumbup_tb:

    @ Telle: Le “je te connais, va !”, c’est tellement vrai (sans jeu de mots) :king_tb:

  11. Je pense aussi faire une ode à Satis… Elle m’accompagne depuis 7 ans déjà et je vais devoir m’en séparer pour rejoindre mon ami sur Paris. Je n’arrive pas à faire comme toi et m’en détacher. Dans une semaine, elle aura un nouveau papa et ça me serre déjà le coeur. Je sais toutefois qu’elle sera entre de bonnes mains, ce qui me rassure complètement.

    J’ai beaucoup aimé ton texte… il me touche énormément !

  12. Super, la vidéo, trop vraie !
    J’ai toujours eu des chats, aussi loin que remontent mes souvenirs. J’en ai perdu 1 ce printemps, j’en ai maintenant un de deux ans et demi et une de 3 mois … le BONHEUR

  13. J’avoue sans honte que j’habite chez Victor (6ans… une fille) et Sushi (caïman 1an, sacré de birmanie… un mossieur) Sushi est un fétichiste de la chaussette… (il pique des paires propres aux voisins… ) et à 5 h du mat’ vient jouer avec mes pieds… bin oui, il n’a plus sommeil, LUI… et je les aime tous les deux !!! D’abord, mes filles ont qu’à faire des bébés… j’arrêterai d’être totalement gâteuse avec mes deux chats ! :devil_tb:

  14. moi qui garde souvent une chatte de lesbienne, c’est vrai que l’animal qui vient foutre le bordel en plein acte seskuel pour marquer sa jalousie, c’est assez énervant… mais c’est mignon aussi 🙂

  15. moi aussi … larmichette … snirfle … mais la vidéo est trop marrante (et trop vraie !) alors j’arrête de renifler !!!

    pour avoir une idée de « comment » je vis … imagine juste que j’en ai 3 … :dunce_tb: + 1 ado :blink_tb: …

    Mel :jittery_tb:

  16. Vidéo très très drôle. J’ai toujours aimé les chats, mais pour l’instant je suis encore chez mes parents et mon père me mettrait à la porte si j’en amenais un ! et puis j’ai une copine en Tale qui en avait un, et j’ai passé l’année à retrouver des poils de chat jusque dans mon sac de classe etc… alors j’hésite !

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