Le mystère d’Absinthe 76 (ou comment se faire outer en beauté en trois étapes)

Episode 1 : Cette drôle d’histoire a débuté le 12 janvier dernier. Je venais de publier un billet sur mon désir de paternité. Juste avant de partir déjeuner, le commentaire suivant fut envoyé par la mystérieuse absinthe 76:

« Parfois les coïncidences sont très troublantes, je suis en pleine lecture de “Espèces en danger” par louis Bayard, sur le même sujet. En tout cas; je suis très heureuse pour toi de cette décision, je croise les doigts. Signé : La voisine d’en face qui arrête de lire le blog si tu préfères… »

Chez Bonum, nous travaillons toujours en binôme. Ma collègue étant partie en congé maternité depuis une semaine, j’avais donc face à moi une parfaite inconnue. Je me suis doucement penché afin de l’observer derrière mon écran. Elle tapait doucement sur son clavier d’ordinateur. Elle s’est soudain arrêtée et m’a fait un petit geste de la main en me souriant :bye_tb: . Je lui ai répondu par un sourire gêné. Et merde. Je ne m’étais jamais fait griller au boulot. Cela faisait seulement quelques jours qu’elle bossait avec moi et elle connaissait déjà l’URL de ce fichu blog. Mais pourquoi ce pseudo. Elle n’était pas née en 1976 mais en 1982. Elle n’était pas originaire de Seine-Maritime mais du Limousin. Peut-être aimait-elle se torcher la gueule à la fée verte ?

Personne n’est au courant de la liaison que j’entretiens avec Snooze, qui travaille accessoirement dans la même entreprise à quelques mètres de mon bureau. Seuls quelques proches connaissent notre histoire. Nono, bien entendu, Mimi Zonzon, et deux autres collègues de Snooze. Certains pourront penser que je fais partie de la classe des honteuses. Et bien oui, honteuse je suis, et honteuse je souhaite rester. Lorsque je suis rentré dans mon agence, j’ai toujours considéré que je n’avais pas à justifier mon orientation sexuelle et parler de ma vie privée. Je n’ai jamais regretté ce choix, encore moins lorsque Snooze est venu me rejoindre. De son côté, il assume parfaitement son homosexualité. Ce n’est pas encore mon cas.

J’ai donc souhaité faire mon enquête. Je me suis connecté de nouveau sur le blog afin d’en connaitre un peu plus sur cette fameuse absinthe 76. Rhaaaa : L’adresse IP provenait du serveur de chez Bonum. Le commentaire avait bel et bien été posté par cette fichue fouine. Mes heures « d’asexuel passe partout » étaient donc comptées. Absinthe était une véritable pipelette et l’ensemble de l’agence n’allait pas tarder à être au courant.
Je suis parti déjeuner en compagnie de Snooze et de Nono. Ils étaient tous hilares. De mon côté, je cherchais comment aborder le sujet avec cette fameuse Absinthe. De retour dans mon bureau, je me suis empressé de vérifier à nouveau l’adresse IP de cet expéditeur mystère: Non, je m’étais trompé. J’étais un idiot. Le commentaire ne provenait pas de chez Bonum.

Mais qui pouvait bien être la mystérieuse Absinthe 76 ?

Entre temps, Nono s’était amusé à envoyer le commentaire suivant :

« Limousine82 @ 5:23 : Coïncidence des plus troublantes car moi aussi je lis ton blog et je suis ta voisine de derrière. »

Nono, connasse. :happy_tb:

Le lendemain, j’avais enfin la réponse à ma question. Blunt venait de poster le message suivant :

« Et bien puisque la voisine d’en face a laissé un commentaire, le voisin d’en face se permet d’en laisser un aussi pour te dire qu’il te félicite, qu’il est très heureux pour toi et qu’il croisera ses doigts avec ceux de la voisine pour que tout se passe pour le mieux pour toi. »

J’étais vraiment trop con. La voisine d’en face était en fait la sœur de Snooze qui habite effectivement face à notre appartement en compagnie de Blunt. La boucle était bouclée et cette aventure m’avait ouvert tous les chakras. J’étais prêt à assumer au travail la relation que j’entretenais avec Snooze et je me moquais du qu’en dira-t-on.

Episode II : Hervé (un collègue du marketing) rentre dans mon bureau quelques jours plus tard et me dit :

« Il parait que vous (Snooze et moi) partez au ski avec Sophie et Eric la semaine prochaine ? Je ne savais pas (pour vous). C’est bien. ». Clin d’œil.

Moi : Mais comment connais-tu Sophie et Eric.

Hervé : Eric est l’un de mes meilleurs amis.

J’étais vraiment grillé. Sophie et Eric n’avaient aucune raison de cacher que nous étions en couple.

Episode III : Lorsque j’étais en doctorat, je passais mon temps en compagnie de François. Je le considère comme mon mentor. J’ai passé plus de quatre années formidables avec lui mais je n’ai jamais pu lui confier que j’étais pédé. Le célibat dans le milieu de la recherche est fréquent car s’occuper de ses souris et monter ses projets de recherche est très chronophage et laisse très peu de temps pour trouver chaussure à son pied. On ne m’a donc jamais trop posé de questions. Je passais la plupart de mon temps au laboratoire. C’était l’essentiel. De son côté, François a fait carrière dans la recherche publique et a récemment obtenu un poste de chargé de recherche. Devant soutenir son habilitation à diriger les recherches (titre obligatoire pour diriger des étudiants en doctorat), il souhaitait mettre des photos de ses amis chercheurs en diapositive de remerciements. Il s’est donc tout naturellement dirigé vers le site « daske » pour y trouver une photo de moi.

Si Google n’associe pas « daske » à ce blog, ce n’est malheureusement pas le cas de Yahoo.
J’ai donc reçu un petit mail quelques jours avant la soutenance :


« Je suis passé sur ton site pour trouver une photographie de toi. Et bien dis-moi, depuis que tu as quitté le laboratoire, tu t’es mis au graphisme et surtout à la « littérature » »

Il ne m’en a pas parlé le jour de sa soutenance, ni lors d’un récent déjeuner en sa compagnie. Mais la boucle était bouclée. J’avais fait engager chez Bonum une étudiante de mon laboratoire. Elle était toujours en contact avec la plupart des chercheurs et était aussi bavarde qu’une pie.

Parfois, se faire griller ne tient vraiment pas à grand chose. Rien en 7 ans et preque trois fois en une semaine… :thumbup_tb:

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