Bree van de Picpus est morte, vive Bree van de Lucien Sampaix

Ce n’était finalement qu’un déménagement. C’était en fait la première fois que je quittais mon chez moi. Lorsque je me suis installé la première fois dans le douzième arrondissement, les choses étaient différentes. Je débarquais directement du cocon maternel et ne n’avais rien en ma possession. Tout juste le contenu d’un coffre de voiture. J’avais économisé pendant toute une année pour tout flinguer un samedi matin chez Ikea. Je vivais alors dans l’appartement modèle de 28 mètres carrés. Nous avions passé tout un week-end à monter les meubles avec les fameuses clefs fournies dans les cartons. Nous avions les doigts tout gonflés à force de visser et de dévisser ces fichus Legos grandeur nature. Je me souviens de cette première soirée passée dans mon premier nid d’amour. Nous n’avions rien à manger et le premier ticket de caisse du supermarché fut salé. J’allais devoir faire vraiment très attention car mon allocation de recherche n’allait pas me permettre de faire le moindre faux-pas. Snooze ne vivait pas encore avec moi. Il s’est installé incrusté quelques années plus tard et nous avons vécu dans ce petit appartement pendant de nombreuses années. Et elle était plus belle la vie.

Cette transhumance était donc différente. Pour nous deux. C’est la première fois que nous prenons un appartement à nos deux noms. Lui c’est moi et moi c’est lui, un point c’est tout. Cela faisait maintenant un mois que nous avions commencé à remplir des cartons. Vider la cave, exterminer mon petit jardin, jeter, vider, détruire, retrouver des trésors. Aucune chose de valeur. Des choses bien plus importantes comme des souvenirs, des lettres et des photos. Et putain, c’est parfois bon les souvenirs.

La dernière journée passée boulevard de Picpus fut éprouvante. Contrairement à Fcrankounet, ce fut la journée des dernières fois. Derniers repas, dernière nuit, derniers bisous. Nous avons empaqueté jusqu’à minuit pour nous réveiller vers 6h00 du matin afin de finir de tout préparer pour les déménageurs. Il nous fallait juste débrancher le lave vaisselle et le four. Monsieur Da Silva nous avait toutefois préparé une dernière surprise maison. Ce connard avait monté la cuisine après avoir installé l’électroménager. Nous avons donc dû démonter une partie de la cuisine, dévisser certains tuyaux, provoquer une inondation et failli s’électrocuter à de nombreuses reprises. J’ai été particulièrement ordurier en maudissant à voix très haute ce couillon d’entrepreneur de mes deux. Les déménageurs sont finalement arrivés en avance. Sept mecs en tout, sept mecs qui ont tirés la gueule en évaluant la quantité de merdes qu’ils allaient devoir s’enfiler pendant toute la journée. Le chef de bande ressemblait au Colonel Kadhafi. Même coiffure et mêmes lunettes. Il m’a un peu fait peur.

Nos nouveaux amis ont commencé par charger les 150 cartons préparés avec amour. Nous avions pris l’option megafeignasse qui consistait à ne pas s’occuper du fragile. Le commercial nous avait assuré que ce service était formidable pour plusieurs raisons. La différence de prix n’était pas très importante avec le service de base et il nous avait garanti que les déménageurs allaient débarquer avec des malles et des penderies, accélérant considérablement la migration et limitant la probabilité de casse. Nous n’avons pas eu le droit aux malles. Un type à emballé tout ce que notre appartement comptait de fragile, mélangeant dans un même carton bouteille d’huile sans bouchon, abat-jour, vibromasseur, bocal à m&m’s ou chaîne hi-fi. Un autre a trié toute la collection de Tétu de Snooze (du numéro 2 à l’édition de mai). Il ressemblait à Dexter et n’appréciait vraisemblablement pas trop les pédés.

L’impression fut étrange. L’appartement était rempli d’individus que nous ne connaissions pas et qui fouillaient dans toutes nos affaires. Une sorte de violation d’intimité volontaire. Bree van de Picpus était cependant comblée. Je passais dans toutes les pièces avec un chiffon dans une main et l’aspirateur dans l’autre. Rhaaaa, j’ai véritablement eu un orgasme en voyant toute cette immonde poussière à aspirer et ces taches de graisse à éliminer. Briquer, nettoyer, vaincre le sale. Super Bree en a même mouillé sa jolie culotte en dentelle de Calais. L’apothéose fut certainement le chargement du réfrigérateur et du canapé. Toutes les vieilles de notre ancien immeuble étaient à leurs fenêtres.

Madame Lopes n’arrêtait pas de passer dans la cour afin de surveiller tout ce petit monde. Sa chienne n’arrêtait pas d’aboyer. Elle m’a indiqué qu’elle (la chienne) devenait folle lorsqu’elle était en présence de noirs, de chinois ou de facteurs. J’avais oublié à quel point elle ne supportait pas la différence. Sentiment curieux de la part d’une personne qui a certainement rencontré beaucoup de problèmes pour s’assimiler à notre société il n’y a pas si longtemps que cela. Elle va pourtant perdre deux tapettes. Seules les deux goudous du quatrième vont représenter notre joyeuse communauté. Les mamies et les papichoux vont dorénavant se faire chier et moins ragoter. Cerise sur le gâteau, cette conne de chienne a disparu au moment ou les déménageurs ont levé le camp. Elle était certaine que ces maudits noirs avaient embarqué l’amour de sa vie. Aux dernières nouvelles elle n’est toujours pas réapparue. Les locataires vont certainement être heureux de ne plus subir les aboiements indécemment matinaux du week-end.

Merci qui ? :bye_tb:

Snooze est parti dans un camion. L’impression fut curieuse. Voir sa vie réduite à deux gros cubes.
Je suis resté seul dans l’appartement vide. Le prétexte était bon. Je devais passer un dernier coup de serpillière afin de rendre un appartement aussi propre que possible à notre ancien propriétaire. Et ce fut le drame. Juste un bon gros chagrin en repensant à tous les moments, bons et mauvais, passés en compagnie de Snooze dans ce putain de cocon. J’avais des yeux de panda et un gigantesque Casper dans les narines. J’ai claqué la porte et j’ai pleuré comme un gamin tout triste jusqu’à la place de la Nation. Les passants m’ont très certainement pris pour un débile. Rien à foutre. J’ai finalement rejoint Snooze qui avait l’air perdu. Il était lui aussi très triste. Il y avait eu de la casse, le nouveau parquet était défoncé à certains endroits et les murs avaient été baptisés.

Tout était finalement terminé vers 19h00. :clap_tb:

Juste le temps de se faire le maillot et d’aller faire un tour à la petite fête organisée par Matoo pas très loin de notre nouveau chez nous. Et surtout de retrouver tout plein de pédés vachement sympatoches que je n’avais jamais eu la chance de rencontrer et de retrouver la fameuse Alice du Fromage, rencontrée il y a un an de cela lors d’une représentation de Rigoletto.

N’empêche, je suis crevé.

Bree van de Lucien Sampaix s’est transformée en loque immonde. Vivement un bon lifting des nichons, une cure de thalasso à Quiberon et le baptême de notre mégachambre à partouze. :king_tb:

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