Dans ta gueule

Mes parents et grands parents m’ont élevé dans la pure (et noble) tradition du « mouche ton nez et dit bonjour à la dame ». Mes géniteurs ont ainsi tenté de m’inculquer les règles les plus basiques du savoir vivre et de la politesse. Tenir la porte, dire bonjour, dire merci, s’il vous plait et sourire. Ne pas mettre mes coudes sur la table, mettre les couverts et aider à débarrasser. Obéir aux règles les plus élémentaires, respecter les autres, ne pas élever la voix, et ne surtout pas se plaindre. J’ai longtemps considéré qu’une telle éducation était un handicap car à trop respecter les autres, un individu lambda est rapidement considéré comme faible par la société, et donc mécaniquement très peu considéré.

Je m’en suis tout d’abord rendu compte à l’école, plus particulièrement pendant mon adolescence entre le collège et le lycée, puis à la faculté. Les dés étaient alors pipés car je passais un concours. Tous les moyens étaient bons pour dégommer un éventuel concurrent. Je me souviens encore d’une étudiante qui s’était rendue dans le bureau du doyen et avait accusé Snooze de l’avoir violentée. Son allure de jeune fille de bonne famille l’affranchissait de tout soupçon. Elle avait en réalité agressé Snooze en plein amphithéâtre et n’avait pas supporté de se faire rembarrer.

Le milieu du travail ne déroge pas à la règle. J’ai longtemps pensé vivre au pays des Bisounours, jusqu’à ce que je traverse une période très difficile et compliquée ou ma supérieure hiérarchique passait son temps à me harceler. Je n’ai jamais cédé, elle a été indirectement invitée à sévir ailleurs. Depuis, sans jamais me comporter comme un requin, je suis constamment sur mes gardes et tente d’anticiper les coups bas, même si je ne travaille pas pour France Télécom.

L’agressivité est avant tout verbale. Il suffit tout simplement de tendre l’oreille et de se trouver au bon endroit au bon moment. Certains lieux sont stratégiques: caisses de supermarchés ou de grands magasins un samedi après-midi, cinémas, accidents de la circulation, réunions de copropriétaires, queues diverses et variées, rames de métro ultra bondées un jour de grève ou voitures prises dans un embouteillage en plein Paris. Les gens sont tendus comme des strings, et prêts à sortir les pires horreurs, ou à se bousculer. Je me souviens encore d’une rencontre avec une femme qui, me criant dessus, m’expliquait que je n’avais pas besoin d’acheter un sapin de Noël car je n’avais pas d’enfant. Elle était prioritaire, un point c’est tout. Snooze et moi-même n’étions que de sales sodomites et méritions de griller en enfer. Combien de fois ai-je entendu autour de moi sale pédé ou enculé. A cela nous avons pris depuis longtemps le parti d’en rire et nous amusons souvent à crier en cœur homophobiiiiiiiie. Plus récemment, un conducteur de 4×4 souhaitait se garer devant notre immeuble, à une place de stationnement interdit, m’empêchant ainsi de sortir mon vélo de la porte cochère. J’ai tenté de lui expliquer qu’il ne pouvait pas laisser sa voiture à cet endroit pour des raisons de sécurité. Il m’a rapidement aboyé dessus en me forçant à lui laisser le passage et en me traitant accessoirement de sale petit pédé. Encore une fois.

Etre cycliste à Paris est l’occasion rêvée de s’en prendre plein la tronche pour pas grand chose, et de constater qu’une grande ville comme la notre est peuplée d’une armada de trolls pervers. Je me suis récemment pris une claque sur la joue alors que j’étais à l’arrêt par une ménagère de moins de cinquante ans hystérique. La femme m’a juste hurlé dessus en me rendant responsable de tous les accidents de piétons à Paris. Il n’était que 7h00 du matin. Je ne compte plus les fois ou des passants donnent des coups de pieds dans les roues de ma bicyclette ou m’insultent parce que je roule sur une piste cyclable. Je m’arrête généralement en leur expliquant cordialement qu’ils marchent sur une voie réservée aux deux roues non motorisées et qu’il ne leur viendrait pas à l’idée de faire la même chose sur la route au beau milieu des automobiles. Les mères de familles démarrent généralement au quart de tour. Beaucoup trouvent les pistes cyclables très pratiques pour manœuvrer les poussettes, et n’hésitent pas à jurer comme un charretier lorsqu’un cycliste passe près de leur progéniture. Juste avant de partir en Inde, je suis tombé de vélo à cause d’un piéton qui refusait de quitter la piste. Une fois à terre, il a commencé à me cracher dessus en donnant des coups de pied sur mes roues.

Les conducteurs de scooter sont également des éléments dangereux et imprévisibles. Ils n’hésitent pas à enfreindre le code de la route, passent par toutes les voies et sont généralement très agressifs. Pas téméraires pour un sou, de vraies petites bites dès qu’on leur répond. De la caste des roquets castrés. :dunce_tb:

Sans jouer au vieux con nostalgique, les temps changent. Si la vie semblait matériellement plus dure il y a quelques années, il me semble que les relations étaient plus cordiales entre les individus, une once de vulgarité en moins. La faute à qui, à quoi, je n’en sais rien. Mais tout était forcement mieux avant. Il n’y a plus de saison ma bonne dame.

Rien à voir avec la choucroute, même si de l’agressivité à la cupidité, il n’y a qu’un petit pas. Certains commentaires sont postés uniquement en réaction aux titres des billets, sans même prendre le temps de le lire les billets en question. Ainsi Jul75009 a-t-il réagi hier midi à un billet publié suite à ma visite de Chicago il y a un peu plus d’un an, et sobrement intitulé « Abercrombie, c’est vraiment très pédé« .

J’expliquais alors que cette chaîne de magasins puait le sexe à trois cents mètres, que les modèles choisis étaient des bombasses, que des mannequins torse-nu attendaient le visiteur le week-end et qu’un parfum aphrodisiaque était vaporisé en permanence: Les phéromones faisant rapidement effet, on quitte la boutique en ayant torpillé sa carte de crédit. On sort pauvre mais désirable, et c’est l’essentiel. »

Jul75009 a semblé être vraiment très contrarié par le fait que j’écrive le mot pédé et a commenté le billet de la façon suivante:

« Abercrombie, c’est vraiment très pédé.

Et c’est pour ça que c’est un succès INTERNATIONAL !
Nous n’avons pas les mêmes valeurs !
Si tu veux t’habiller très STRAIGHT, très HETERO…Achète toi un SAC A PATATE ! Sinon continue à venir CHEZ LES PEDES !

La prochaine fois : Abercrombie, c’est vraiment très GAY. STP…
Sinon je vais pk pas faire un article en disant que DIA, c’est vraiment très Nègre ! OU alors pourquoi pas RALPH LAUREN c’est vraiment très Feuj ….

Un peu de respect STP ! »

Si ce commentaire un peu crétin et très premier degré n’est pas une blague, Jul75009, rassure-toi, je ne pense être ni homophobe, ni manquer de respect à la communauté homosexuelle en m’exprimant ainsi. Le terme suceur de bite aurait peut-être été plus approprié.

Mes excuses les plus plates. :blush2_tb:

22 commentaires sur “Dans ta gueule

  1. Pédé et fier de l’être !
    roidetrefle, le problème dans la race humaine c’est que certains n’ont pas l’air d’avoir été informé que l’intelligence ça se cultive… 😀

  2. -L’expérience m’a appris que la politesse et le respect des autres,était payants.
    -2 ans après avoir quitté Paris,je vois que les Parisiens sont toujours des modèles de savoir vivre. :wub_tb:
    -dire « pédé »,lorsqu’on est gay,ce n’est pas manquer de respect,c’est de l’humour,ou de l’auto-dérision.
    De même qu’un de mes amis d’origine italienne,se qualifie de « rital ».Je ne me permettrais jamais d’utiliser ce terme,lui peut le faire.

  3. En fait, nous roulons avec les poussettes sur les pistes cyclables parce que les trottoirs sont toujours encombrés par des troupeaux de pouffes qui marchent de front à deux à l’heure en tordant du cul, et qui empêchent de passer la mère de famille pressée de larguer sa marmaille à la garderie pour aller draguer au rayon puériculture du Leclerc.
    Dans ma ville, ils sont intelligents : les pistes sont divisées en deux, un côté pour les vélos et l’autre pour les piétons et assimilés (Grenoble est la ville des fauteuils roulants).

  4. Ben dis donc… je n’imaginais pas les piétons aussi pénibles.

    Tu crois que l’insulte « pédé » est ciblé (qu’ils t’ont « identifié ») ou que c’est juste une habitude, comme se faire traiter de salope ou de mal baisée qd on est une fille?

    Il faudrait qu’on trouve une insulte pour les hétéros: « supporter du PSG », c’est possible?

  5. Alors j’allais abonder tant que je peux sur la partie partage de la voirie, et je me suis souvenue que je change un peu d’avis selon ma position (dans la voiture ou sur le trottoir, aucune des deux n’ayant -a priori- de connotation sexouelle).

    Mais c’est vrai qu’on en vient à être surpris quand on rencontre un(e) inconnu(e) courtois(e).

    Quant au commentaire, tu as bien fait de le mettre dans le billet, je ne l’avais pas lu, du coup j’aurais râté une occasion de rire…

  6. Je me souviens bien de ce commentaire. Je m’étais dit que cela ne pouvait être que du second degré.
    Quand tu es aimable à Paris, tu passes tout de suite pour un plouc de province. Je me souviens de mes débuts là bas, qui tenais les portes pour entrer dans les bouches de métro, sans avoir le courage de la laisser se refermer sur le flot de voyageur 🙂

  7. Et si moi j’écris « Abercrombie, connais pas », vais-je me faire cataloguer ‘plouc’ par le Jul en question…?

    Enfin, grâce à toi (et à lui aussi n’oublions pas), je me coucherai un peu moins bête ce soir…

    « des mannequins torse nu qui attendent les visiteurs le week-end », humm, c’est vrai que ça gagne à être connu….

  8. Homophobiiiiie!
    Et j’ai une question qui me turlupine depuis des siècles:
    pourquoi SALE petit pédé? Petit, bon, c’est bien vu ces temps-ci, non? pédé, gay, homo (rayer les mentions qui ne conviennent pas), c’est pas si grave; Mais sale?…. Un peu comme « grosse conne »: conne, soit, mais grosse!

  9. Pour faire écho à la fin de ton billet, »suceur de bites », c’est pas mal, mais ma préférence cordiale, émue et rêveuse irait presque à cette délicieuse expression que je pense bien avoir découvert ici-même, et qui me laisse rêveuse sur cette politesse enseignée par ta maman et ta grand-maman : « PD du cul » …
    Et oui, comme tu peux le voir, j’ai lu, tout le billet, et jusqu’au bout ;-))))

  10. Ce qui me fait frissonner d’aise est lorsque tu souris à quelqu’un qui t’insulte, t’agresse ou te bouscule et lui demande simplement plait-il ou ce qu’il désire est de voir sa tête s’allonger comme si tu a un comportement d’extraterreste. Plus particulierement à Paris la seule méthode de communication est l’injure. Mais ne pas répondre sur le même registre demande du temps.

  11. tes vraiment une grosse tapette bien elever … mais je te conprends et tu sais j ai un oncle comme sa et ceux de ma famille l on mal pris et puis il a pas le meme carractere que nous a 8h il fait dodo il fait des sieste il ne vien j amais on fete de famille mais luis il n en peut rien si il a remarquer qu il etait comme sa ses pas sa faute … mais ne regarde pas se que les aute dise vie ta vie si tu est heureux ses le principale

  12. « les relations étaient plus cordiales entre les individus, une once de vulgarité en moins. La faute à qui, à quoi, … », le cass toi pov con de notre n°1, le doigt du n°2, les tapettes du gros Douillet, la tarlouze du non moins gros Nicolin roi de la poubelle. Tu vois les exemples venant « d’en haut » ne manquent pas. Le gars qui a brandi un panneau sur lequel était écrit  » casse toi pov’con » est passé en jugement et a eu 30 euro d’amende à payer : lui n’avait pas le droit!!

  13. C’est un vrai problème linguistique ! Qui a le droit d’utiliser tel terme… et quel connotation cela prend-il en fonction de la personne ?! :o)
    Le Jul en question n’a juste pas réalisé la situation, et réagi épidermiquement comme on pourrait tous le faire. Encore ici c’est assez drôle, mais je me souviens de ce genre de « malentendu » très douloureux d’une part chez Kozlika à propos de judaïté, et puis sur le blog d’un tout jeune homme décédé, où sous une photo (en mémoire) de lui, une poufinette avait écrit « t tro bo goss ! lach t comm sur mon blog » (ou un truc dans cet esprit). C’était assez affreux. Bref
    Pour les insulteurs piétons ou autre, il faut répondre : « M./Mme/Mlle, vous êtes très impoli » ! :o)

  14. Je proposerai volontiers des leçons de lecture à Jul75009 qui apparemment a dû sauter son CP…
    Sinon une greffe de cerveau est aussi une possibilité. Quelques généreux donateurs ?

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