Fan des années quatre-vingts

…oui fan jusqu’au bout des seins.

Espace, frontière de l’infini vers lequel voyage notre vaisseau spatial. Sa mission: Explorer de nouveaux mondes étranges, découvrir de nouvelles vies, d’autres civilisations, et au mépris du danger, reculer l’impossible. Musique du générique. Tudu dududududu, dududu, dududududu. Spok à l’inter. Téléportation. Zou.

D’autres auraient certainement cité Lamartine ou Kant pour illustrer un billet consacré au temps. Oui, Lamartine est définitivement bien plus chic qu’une réplique un peu pourrie issue de Star Trek.

C’est en écoutant récemment une compilation du meilleur du pire des années quatre-vingts que je me suis aperçu avec horreur que (i) j’étais définitivement devenu une vieille peau, (ii) que je me dandinais finalement encore pas si mal sur des rythmes endiablés, et que (iii) ma notion du temps évoluait considérablement avec l’âge. Ainsi ai-je longtemps considéré, en étant né dans les années soixante-dix, que les Beatles ou Jimmy Hendrix appartenaient à la préhistoire de la musique moderne. Ces artistes ont pourtant émergé une petite décennie avant ma naissance. Un peu comme si un enfant né dans les années deux mille considérait que Nirvana sentait le pipi rance (ce qui n’est pas forcément faux au premier degré).

Forrest Gump, c’est moi. Depuis tout petit, j’ai pourtant un rapport très particulier avec le temps car j’ai une grande mémoire des dates. Je rapporte ainsi très facilement un événement à une date, et relie rapidement entre eux tous les instants qui ont marqué ma vie, qu’ils soient familiaux, politiques ou sociaux. Les dates de sortie de certains albums de musique ou de films de cinéma me servent souvent de repères, tout comme mon parcours scolaire ou universitaire. J’énerve particulièrement Snooze en étant capable de dater au jour près un événement donné. Comme beaucoup, j’ai particulièrement été marqué par les années quatre-vingts, les années des extrêmes.

J’ai rapidement été conditionné au tout début de cette décennie par ma grand-mère paternelle, un peu fasciste, qui n’avait qu’une seule peur, que les chars soviétiques ne roulent sur les Champs si les communistes remportaient les élections présidentielles de 1981 (Abba, the winner takes it all). Il y avait cependant très peu de chances que Giscard ne soit pas réélu (Queen, Another one bites the dust). A l’international, nous risquions un enlisement de la guerre froide après l’élection de Reagan et de Thatcher au Royaume-Uni (Diana Ross Upside down). Oui mais voila, François Mitterrand réalise bien une OPA sur le pays (Ricchi e Poveri, Sara Perche Ti AMo). Ma mère est folle de joie (John Lennon, Woman), mon père est catastrophé. Mes parents m’exportent deux longs mois en Espagne chez mon meilleur ami. La peine de mort est enfin abolie par les socialistes. C’est également le début du TGV et la série Dallas est programmée le samedi soir sur TF1.

La mort de Brejnev en 1982 est considérée comme le début de la fin pour l’Empire Soviétique (Joan Jett, I love rock’n roll). Lech Wałęsa commence à inquiéter le pouvoir Polonais. Mon école catholique soutient publiquement Solidarność et organise régulièrement des manifestations diverses et variées pour soutenir le mouvement (Indeep Last night a DJ saved my life). C’est également le temps du contre-choc pétrolier. Le pays s’enfonce dans la crise. Tout semble triste, ou presque: En juillet 1982, l’homosexualité n’est plus considérée comme un délit en France.

En 1983, le pays commence à fortement s’américaniser. C’est l’arrivée des premiers vidéo-clips et des chaines de restauration rapide. Tout le monde s’enflamme pour Flashdance (Irene Cara, What a feeling). J’évite tout juste un redoublement et mes parents me punissent en m’envoyant en Allemagne pour apprendre la langue (Bananarama, Cruel Summer). J’atterris finalement chez une charmante famille francophile et passe mon temps à parler français (Elton John, I’m Still Standing) et à manger du Nutella. Le VIH est isolé par l’équipe de Luc Montagnier à Pasteur.

Une année plus tard, c’est l’arrivée de Canal Plus (Smooth Operator, Shade), des radios libres, mais également de mon premier Amstrad CPC 464 couleur (Girls just want to have fun, Cindi Lauper).

1985 marque l’arrivée de Gorbatchev au pouvoir (Niagara Tchiki boum). Reagan est toujours présent (James Brown Living in America). En 1986, l’Espagne et le Portugal rejoignent la communauté européenne (Erasure, Oh l’amour). Les socialistes perdent les législatives au profit du RPR et de l’UDF. Jacques Chirac devient premier ministre (Prince, Kiss). Le Front national entre à l’Assemblée nationale et obtient 35 sièges. Je suis définitivement obèse, porte des fringues improbables, mes camarades de classe me surnomment Groquik (Coryne Charby, Boule de flipper) et je chausse déjà du 45. Tchernobyl nous explose en pleine tronche, mais la radioactivité sera heureusement stoppée par les Alpes. TV6 et la 5 commencent à émettre.

En 1987, je tente de sortir avec une fille mais je me fais jeter (Vanessa Paradis, Joe Le Taxi). Nous partons avec ma classe pour une semaine à Madrid. Je tente également de fumer ma première cigarette et m’étouffe en vomissant sur la chaussée (Genesis Land of confusion). C’est surtout l’année du divorce de mes parents et de la rencontre avec ma future belle mère (U2, With or without you), de mes premières sorties entre amis, et de mes premiers concerts. Je commence enfin à avoir une vie sociale et perd petit à petit du poids. L’adolescence est vraiment une période très cruelle. Une année plus tard, ma mère m’offre mon premier lecteur de CD et organise une traversée de l’Allemagne de l’Ouest (S Express, theme from S express). C’est également l’année de la réélection de François Mitterrand (Eight Wonder, I’m not scared). Le violet est à la mode, les pull col cheminée, les jeans neige et les affreux t-shirts Waikiki font leur apparition, tout comme mes premiers boutons d’acné.

La dernière année de la décennie est certainement l’une des plus marquantes avec la chute du bloc soviétique (Technotronic Pump up the Jam) et les manifestations de Tian’an men à Beijing. Je commence à sortir de plus en plus avec mon grand ami de l’époque Anthony, passe quinze jours à me chier dessus en Turquie (Madonna like a prayer), et Paris devient temporairement la capitale du monde à l’occasion de la célébration du bicentenaire de la révolution Française (Depeche Mode Personal Jesus).

En résumé, les années 80 sont des années fortement contrastées ou le meilleur a côtoyé le pire, un peu à l’image de la production musicale: New wave, ska, new beat, acid house, gothique, disco funk, pop, reggae, word music, tout y est passé.

Let’s do the time walk again!

16 commentaires sur “Fan des années quatre-vingts

  1. Je suis choqué que tu n’évoques pas Gloria par Shaila en 1982. Qui a peut-être contribué également à ébranler le monde soviétique… :king_tb:

  2. Ma Cheurie tou sais qué la douDOUne Marty McFLY elle est dé rétour dans lé rayons de les magasins de fRINgueuh ?

    Qué si tou vaux être soublaïme cet hiver il té la faut, avec des bottes de pétasse, parce que rien que c’est le glamour, que tou séra ma-gni-faïque !!!

    C’est le total rivaïvol eighties !

  3. C’est marrant je fonctionne exactement pareil que toi et ça paraît toujours curieux pour les autres! Du coup, quand un média quelconque se trompe sur l’année d’un grand évènement ou de sortie d’une daube musicale quelconque, ça me fout en rogne pour le reste de la journée… On ne se refait pas, hein :dunce_tb:

  4. Pour moi ce fut aussi les années noires du Sida. J’ai une mémoire des évènements que des musiques…. et il n’y a pas beaucoup de musique de chez nous … pour que je m’y retrouve :happy_tb:

  5. Je rêve ou tu as oublié celui qui s’est égaré dans la vallée infernale, à la recherche de l’Ombre Jaune ? L’aventurier contre tout guerrier ! :king_tb:

  6. Je hais les petits cons nés dans les années soixante dix qui ne respectent pas leurs aînés. Mais ce n’est pas grave car je n’ai absolument aucune mémoire et surtout pas celle des dates ni des noms. Par contre je me souviens très bien que tu m’as montré ta collection de Japonaises qui se vomissent et se font caca dans la bouche… :furious_tb: Mais à quelle date? Les noms des Japonaises ? :huh_tb:

  7. Cool, ton texte !
    « Cool », c’est le mot que je retiens de cette période, qui fut en fait horrible pour moi un long cauchemar dont je ne me rappelle que peu de détails, grâce à la sélectivité de la mémoire.

    6 mai 1981 : j’entendis mes parents, devant la télé à 20h, crier avec leur habituelle intonation BCBG « Mêêêêêêêêrrrrrde !!!! », moi, la petite fille de 6 ans de cette famille bourgeoise d’extrême-droite, ça m’avait choquée, mes parents disant un gros mot devant mes 3 frères et moi, c’était la première fois ! Alors j’ai compris qu’il se passait quelque chose de grave (pour eux ! ) , mais je ne savais pas quoi… Je n’ai compris ce genre de choses que plus tard.

    J’ai opéré une révolution personnelle totale à l’adolescence, à partir de mes 13 ans, car on m’en faisait trop baver : école secondaire catho intégriste hors contrat, donc sans aucun contrôle de l’Etat, non mixte (mes frères allaient donc dans une autre école, de garçons, dans le même style) , uniforme, bourrage de crâne religieux culpabilisant et très efficace car ma famille était en accord total avec ça, donc chez moi c’était aussi dictatorial, je vivais dans un véritable ghetto, parce que les gens ayant des idées politiques et religieuses d’extrême-droite (catholique) ne se mélangent pas du tout à la population « normale » (ou le moins possible, par obligation professionnelle pour les hommes, seuls à travailler en général dans ces familles) . Je ne connaissais à l’époque aucune femme qui travaillait ou qui prenait la pilule. J’avais fini par sympathiser avec 2-3 camarades de classe, mais nous n’étions pas très proches, elles étaient dans l’idéologie intégriste et extrêmiste, je ne me confiais jamais à elles, je me sentais terriblement seule. Personne dans ma famille ne m’aidait, bien au contraire.

    Jusqu’à mes 17-18 ans, je n’avais comme information sexuelle que celles que j’arrivais parfois à entendre à la radio en cachette avec mon walkman, et donc ce fut d’abord grâce à Radio FG (encore assez libre et délirante à l’époque) , alors que je ne savais presque rien de la sexualité « hétéro » ! Quand il a commencé à y avoir des messages à la télé pour le préservatif (« Il court il court, le SIDA… il ne passera pas par moi ! ) , je ne comprenais pas comment pouvaient s’utiliser ces préservatifs ronds… Car ils n’apparaissaient jamais déroulés à l’écran ! De toute façon, à l’époque, je ne vois pas avec qui j’aurais pu en utiliser…

    Avec cette « éducation », la chose qui fut la plus difficile pour moi, fut de vivre librement ma sexualité, comme certain-e-s d’entre vous, mais pas pour les mêmes raisons peut-être… Les choses auraient été presque plus faciles pour moi dans les années 80, si j’avais été lesbienne ! Car avoir un copain était alors impossible, en revanche, j’ai dormi plusieurs fois dans le même lit qu’une copine, faut de place chez elle, et ça ne dérangeait pas du tout mes parents…

    J’ai commencé ma « libération » quand je suis entrée en 1993 à la fac de… Nanterre ! Au grand dam de mes parents… J’étais une extra-terrestre au début dans cette fac, en particulier parce que je découvrais la mixité et la liberté de pensée, il était temps !
    Il m’a fallu des années pour m’enlever de la tête toutes les horreurs que ma famille et mon école y avait mises.

    Maintenant, quand je pense à cette époque, j’ai l’impression d’avoir vécu sur une autre planète, un monde de gens qui ne font qu’obéir à des chefs religieux qui ne connaissent rien à la vie, des gens qui n’ont aucune liberté, qui une conception malsaine de l’amour et de la sexualité qu’ils s’interdisent presque complètement, qui adorent se rendre malheureux et qui tentent de rendre les autre malheureux, à coup de croyances et de menaces aussi terribles qu’irrationnelles. On a de la chance en France que ces gens-là soient assez minoritaires. Mais ils ont quand même de l’influence dans notre société, avec l’aide, involontaire pour eux, des intégristes des autres religions.

    J’ai bien fait de traverser l’espace interplanétaire ! Tout ça c’est loin derrière moi maintenant, et je suis heureuse et libre, notamment grâce à mes ami-e-s.
    Et je partouze tous les soirs.
    Euh, non, j’exagère légèrement, là…

  8. Euh… le 10 mai 1981, et non le 6 mai… Je ne connaissais pas la date par coeur, oui, j’étais vraiment dans un autre monde, dans les années 80 !

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